CULTURES (SYSTÈMES DE), agronomie

CULTURES (SYSTÈMES DE), agronomie
CULTURES (SYSTÈMES DE), agronomie

La notion de «système de culture» est moderne. Elle apparaît pour la première fois, semble-t-il, sous la plume de l’abbé Rozier dans son Cours complet d’agriculture (1785). Il écrit: «Plusieurs écrivains se sont occupés de dicter des lois sur la culture et on a appelé leur code un système.» Il édictera lui-même les principes «d’après lesquels il croit qu’on peut se régler pour la culture des terres».

L’abbé Rozier créait ce concept à partir d’un effort de justification théorique tant des pratiques culturales observées que des nombreuses propositions d’améliorations qui virent le jour au XVIIIe siècle.

Lorsque les connaissances agronomiques étaient encore rudimentaires, les modes d’exploitation du milieu naturel par l’homme résultaient d’une expérience très empirique. Chaque fois qu’un groupe avait découvert un équilibre entre la fertilité du milieu naturel, les techniques culturales connues et les circonstances économiques et sociales, il ne pouvait que l’ériger en absolu à respecter. En effet, dans l’ignorance des mécanismes qui régissent le comportement du sol, des plantes cultivées, etc., les modifications étaient hasardeuses. Toutes celles qui ont été introduites progressivement l’étaient du fait de l’augmentation de la population, de l’accroissement de ses besoins alimentaires ou guerriers (par exemple ceux des chevaux qu’il fallait nourrir avec de l’avoine).

De fait, les modalités culturales définissaient un système de culture, c’est-à-dire la manière dont un groupe humain tirait parti de la nature pour satisfaire ses besoins. Le système de culture, puisque les modalités techniques étaient peu variées, pouvait être caractérisé finalement par le seul énoncé des plantes cultivées localement.

En considérant le territoire cultivé comme un système, en essayant de rendre compte des résultats obtenus empiriquement chaque fois qu’une innovation était adoptée, les agronomes vont progressivement constituer une nouvelle discipline scientifique: l’agronomie.

1. La naissance des rotations culturales

Si l’on excepte la culture itinérante, le problème a toujours été de savoir si l’on pouvait cultiver constamment la même plante sur une surface, s’il fallait alterner les espèces, si, enfin, des périodes de repos (jachère) étaient nécessaires.

Chez les Grecs, on connaît l’alternance jachère-blé. Très vite, les hommes ont le souci d’utiliser le sol durant la jachère; aussi, dans les terrains les plus fertiles, introduit-on l’alternance blé-légumineuses, celles-ci, aliment pour l’homme et le bétail, entraînant, de plus, une augmentation des rendements du blé. Dans le haut Moyen Âge, les progrès réalisés sous l’Empire romain se perdent souvent. En Gaule, après une défriche, on cultivait blé sur blé tant que les rendements étaient jugés acceptables, puis on allait défricher ailleurs. Ce n’était plus qu’une culture itinérante améliorée. Mais, déjà à cette époque dans les Flandres, on avait découvert la succession jachère-blé-céréales de printemps, et on lui associait, sur la même exploitation agricole, les prairies qui permettaient l’élevage et la production du fumier pour «engraisser» les terres de cultures.

Il y avait, en effet, nécessité d’un équilibre entre l’élevage et les surfaces en culture, lorsque l’on souhaitait en améliorer la production. Les animaux fournissaient le fumier nécessaire mais exigeaient, pour leur alimentation, des surfaces en prairie et un complément alimentaire: les céréales de printemps. Lorsque cet équilibre n’était plus respecté, le manque de fumier entraînait l’épuisement progressif du sol. C’est ce qui se produisait au début du XVIe siècle dans la région de Venise. Tarello, en 1566, dans son ouvrage Ricordo d’Agricoltora , propose alors, à côté des prairies, la succession suivante: jachère avec travail du sol-blé-deux années de trèfle. La production d’herbe introduite dans la succession des cultures permet de nourrir le bétail et, comme le trèfle est une légumineuse, enrichit en même temps le sol. Cette nourriture pour le bétail permet d’écobuer chaque année le cinquième des prairies et de cultiver ensuite cette surface de la manière suivante: millet-seigle-blé-blé-blé avant de la remettre en prairie. Ce fut l’échec; la succession proposée après écobuage était beaucoup trop épuisante pour la majorité des sols mis en culture et non irrigués, ce qui entraîna une diminution de la production des céréales, phénomène grave dans une région surpeuplée, et donc l’abandon du système.

Plus tard, chaque fois que le climat ou la possibilité d’irriguer l’autorisait, on a remplacé la jachère par une culture sarclée; puis les progrès agronomiques permirent de mieux régler l’alternance des cultures. Une bonne illustration de cela est la succession dite «de Norfolk»: navets-orge-trèfle-blé. Elle constitue un immense progrès: elle permet de réduire la surface en prairie, car elle fournit et des aliments pour le bétail et deux récoltes de paille pour le fumier; de plus, la présence des navets, culture sarclée, permet avec le trèfle, plante étouffante, de lutter contre les adventices des cultures, et la légumineuse enrichit le sol en azote avant la céréale «noble», celle qui, avec la viande, fait vivre la population. L’ordre de succession des cultures répond alors à des préoccupations spécifiquement agronomiques.

2. De la définition de Gasparin à la définition actuelle

À partir du XIXe siècle, l’agronomie naît véritablement. On découvre que le rôle des légumineuses est dû à l’azote fixé dans leurs nodosités, que les plantes se nourrissent d’éléments minéraux. N’y a-t-il pas là de nouvelles possibilités de sortir des systèmes de culture anciens? De nombreux travaux d’agronomes tentent de préciser le concept de système de culture. Moll croit pouvoir ne retenir que deux systèmes: l’intensif, qui accumule beaucoup de travail et de dépenses sur une surface réduite; l’extensif, qui en est le contraire. A. de Gasparin propose, pour sa part, la définition suivante (1844): «Le choix que fait l’homme des procédés par lesquels il exploitera la nature (pour en obtenir une production), soit en la laissant agir, soit en la dirigeant avec plus ou moins d’intensité en différents sens, est ce que nous appelons système de culture , et l’on voit que cette définition comprend l’ensemble des opérations agricoles qui constituent une exploitation, et la nature des moyens physiques et mécaniques que nous mettons en usage soit pour faire croître, soit pour récolter et utiliser les végétaux.»

Il distingue alors trois systèmes de culture.

Le premier est basé sur les forces spontanées de la nature: ce sont les forêts et les pâturages permanents.

Le deuxième système est basé sur le travail de l’homme aidé des forces de la nature. Gasparin y sépare:

– le système celtique: plusieurs années de culture sur un écobuage, puis retour à la forêt, à la lande;

– le système des étangs: alternance de cultures avec des temps de repos sous eau;

– le système des cultures arborescentes, qui mélange arbres et cultures intercalaires.

Le dernier système, à son avis le meilleur, repose sur l’activité globale de l’homme qui supplée la nature pour faire croître les plantes et leur fournir les aliments; Gasparin le subdivise en deux:

– culture continue avec apport d’engrais (ici, essentiellement, les tourteaux, le noir animal, les végétaux comme la bruyère, le goémon) obtenu sur d’autres surfaces;

– culture continue avec fabrication d’engrais sur la même surface.

La définition proposée dépasse l’agronomie au sens strict, et l’on comprend pourquoi cette notion est aussi utilisée par les économistes. Cependant, la classification de Gasparin est essentiellement basée sur le mode de maintien de la fertilité d’un terroir et donc, finalement, est du ressort de l’agronome. Pour l’économiste, la notion de système de production serait préférable, car elle est plus large et recouvre mieux la totalité de l’exploitation agricole.

Ainsi, et la suite du texte de Gasparin le montre bien, l’accent est mis sur la gestion de l’espace agricole exploité par une unité de production, l’exploitation agricole , qui diffère des unités territoriales ou humaines d’autrefois, dont les assises étaient souvent de nature fiscale, comme le manse (Marc Bloch). On exclut ainsi du champ d’application du concept les espaces plus vastes mis en valeur par les groupes humains, et pour lesquels, pourtant, les mêmes questions se posent.

On pourrait s’interroger sur le fait que la naissance de ce concept semble suivre le développement de l’«individualisme agraire» (Marc Bloch), comme si la possibilité et la nécessité d’une telle réflexion avaient été liées à une diversification des choix techniques et économiques. Néanmoins, des contraintes collectives vont encore peser longtemps sur les choix des agriculteurs; par exemple, dans les pays de champs ouverts (fig. 1), la plupart des grandes options techniques dépendaient de l’avis général de la communauté villageoise.

L’exploitation agricole devient donc le système englobant des systèmes de culture. On caractérise alors, entre autres, les exploitations agricoles par leurs rotations culturales (succession des cultures dans le temps sur une parcelle) et par leurs assolements (répartition annuelle des surfaces des différentes cultures). Cela conduit Heuzé, dans son Cours d’agriculture pratique (1862), à traiter simultanément sous le vocable «système de culture» d’aspects agronomiques ou économiques. C’est ainsi qu’il classe les systèmes de culture, soit selon la surface et l’importance des capitaux et de la main-d’œuvre nécessaires, soit selon la proportion dans l’assolement des différentes cultures, soit enfin selon la nature même des cultures (arboriculture, cultures céréalières, etc.).

De Gasparin analysait les successions de cultures en retenant pour critère fondamental les apports et les exportations d’éléments minéraux. Heuzé tient mieux compte du fait que la fertilité d’une terre met en jeu d’autres facteurs que les éléments minéraux. Pour lui, il est donc nécessaire d’élaborer empiriquement des rotations culturales qui, accordées au contexte économique, maintiennent ou améliorent la fertilité du milieu naturel (fig. 2). Une plante cultivée a deux rôles: elle assure l’approvisionnement en un certain produit; elle modifie, soit directement, soit par les techniques culturales qui lui sont appliquées, le milieu naturel. Cette dernière action conduit l’agriculteur à se préoccuper de la place de chaque plante cultivée dans la rotation culturale.

Au cours du XXe siècle, les techniques agronomiques ont beaucoup évolué, les conditions économiques également. Ainsi, à côté de l’apparition des herbicides et des fongicides chimiques, les outils se sont modifiés, puis on a assisté à la séparation de plus en plus fréquente de l’élevage et de la culture, et actuellement le phénomène primordial est la recherche de successions de cultures aussi simples que possible; le souhait le plus ardent est de ne plus être contraint par les rotations culturales. N’oublions pas non plus l’effort considérable d’amélioration variétale.

Cette dernière évolution, jointe à l’accroissement des connaissances, a donné naissance à la définition actuelle qui intègre les divers facteurs intervenant dans l’utilisation de l’espace pour en obtenir une production, facteurs qui, de ce fait, jouent sur l’évolution de la fertilité du milieu.

Le système de culture, «sous-ensemble du système de production, est défini, pour une surface de terrain traitée de manière homogène, par les cultures pratiquées avec leur ordre de succession et les itinéraires techniques (combinaison logique et ordonnée des techniques culturales) mis en œuvre» (I.N.A.P.G.-I.N.R.A., 1976).

3. Les connaissances actuelles en matière de succession des cultures

La répétition de la culture d’une même plante sur une même parcelle entraîne très fréquemment une baisse des rendements. Les expériences de la station agronomique de Rothamsted, en Angleterre, sont très significatives à cet égard (tabl. 1). L’introduction d’une année de repos (jachère) a permis de doubler les rendements quelle que soit la fertilisation. Des expériences analogues sur d’autres cultures, en d’autres milieux naturels, permettent de préciser que:

– la majorité des plantes cultivées se comportent comme le blé;

– certaines plantes peuvent, néanmoins, occuper la même parcelle durant de nombreuses années; c’est le cas du maïs, de la canne à sucre; pour ces dernières, le rendement en culture répétée est néanmoins presque toujours inférieur à celui de ces mêmes plantes lorsqu’elles alternent sur la parcelle avec d’autres espèces végétales.

On observe aussi que le rendement d’une plante varie selon la culture précédente (tabl. 2). D’une manière plus générale, l’histoire de la parcelle modifie le comportement de la plante en place et son rendement. Les agronomes ont pour tâche de mettre en évidence les phénomènes responsables de ces variations de rendement. Pour cela, ils définissent:

– un effet précédent cultural, comme la modification des états du milieu résultant de l’espèce cultivée (voire de la variété) considérée et des itinéraires techniques qui lui sont appliqués (année n );

– un effet suivant , qui traduit la sensibilité de la nouvelle culture (année n + 1) à l’état initial de la parcelle, donc à l’effet précédent. Cette sensibilité dépend de la variété cultivée considérée et de l’itinéraire technique qui lui est appliqué.

Les agronomes du XIXe siècle se sont surtout intéressés à l’équilibre nécessaire entre les quantités d’éléments minéraux prélevés par la plante et celles apportées par les engrais et le sol. Lorsque l’exploitation était très autarcique, les éléments minéraux prélevés dans le sol y retournaient en majeure partie par l’intermédiaire des fumiers; à l’heure actuelle, la vente des produits entraîne des pertes très élevées qu’il faut compenser par les engrais (tabl. 3). Les progrès dans la sélection végétale entraînent de fortes augmentations de rendement et donc des exportations minérales de plus en plus élevées qui ne sont pas toujours compensées par la fumure.

Le parasitisme, cause fréquente de baisses de rendement, dépend pour beaucoup de l’histoire de la parcelle. La répétition de la même plante favorise le multiplication de ses parasites animaux et végétaux. Comme il existe de nombreux parasites communs à plusieurs espèces cultivées, on voit que l’ordre selon lequel les cultures se succéderont sur la parcelle ainsi que l’intervalle de temps entre les cultures sensibles pourront avoir une influence sur le parasitisme et donc sur les rendements. L’expérience relatée dans le tableau 4 est significative à cet égard, puisque le passé de la parcelle est le même dans les deux cas, à l’ordre près de succession des cultures, mais le haricot est insensible au parasite animal commun au chou et à la betterave. Un cas particulier du parasitisme est celui des adventices des cultures, les mauvaises herbes. La multiplication de ces dernières est fonction des possibilités de lutte dans les cultures précédentes, une invasion pouvant provenir de graines conservées dans le sol depuis plusieurs années.

L’état structural du sol est modifié par les cultures, soit directement par la plante, soit indirectement par les techniques culturales qui lui sont appliquées. L’exemple le plus connu est l’influence néfaste des charrois à la récolte lorsque le sol est humide. L’amélioration de la structure par les graminées prairiales est maintenant bien établie et elle justifie souvent leur introduction dans les successions culturales. La résistance de la structure aux actions dégradantes du climat ou des outils, c’est-à-dire la stabilité structurale, est, elle aussi, fonction de l’histoire de la parcelle. Or un sol dont la structure se dégrade trop rapidement peut amener de graves mécomptes. La stabilité structurale est en partie liée à l’état organique des terres, qu’il importe donc également d’analyser.

La seule considération de l’effet précédent est insuffisante: il faut aussi s’interroger sur les phénomènes cumulatifs et, pour cela, étudier l’histoire de la parcelle cultivée en la considérant comme un ensemble de mémoires , plus ou moins affectées par les effets précédents successifs. On peut classer des mémoires selon qu’elles concernent:

– les accumulations de matières avec des processus d’équilibre ou non;

– les variations des populations d’êtres vivants, qui peuvent, dans certains cas, être soumises à des processus d’équilibre;

– les changements d’état physique, plus ou moins progressifs.

4. Les problèmes à résoudre

Malgré les progrès rapides de l’agronomie, la complexité des phénomènes est telle que l’agronome se trouve encore souvent dans l’incapacité d’expliquer les raisons des faits observés et donc de les corriger.

Pour l’agriculteur d’aujourd’hui et de demain, deux grandes questions se posent:

– Comment, sur l’exploitation agricole et dans le cadre de ses contraintes, combiner au mieux chaque année la gestion des différentes parcelles et donc choisir leur système de culture, pour atteindre les objectifs socio-économiques fixés à court terme?

– Comment assurer, à travers cet objectif de reproduction à court terme du système de production, la conservation du milieu, gage de la reproduction biotechnique à long terme, d’une part, et le respect d’exigences externes à l’agriculture, telle la non-pollution des eaux, d’autre part?

L’agronome pourra alors considérer un système de culture de deux points de vue: comme résultat de l’activité agricole, et comme programme de mise en valeur d’un milieu à l’intérieur d’un système de contraintes. Dans chaque cas, sa démarche devra se situer à deux échelles de temps, court terme et plus long terme, et à deux niveaux d’organisation, la parcelle et l’exploitation agricole.

Pour mener à bien ces approches, qu’il s’agisse d’expliquer le passé ou de prévoir l’avenir, l’agronome moderne doit pouvoir répondre à plusieurs questions:

– Comment réagit un peuplement végétal donné aux états instantanés du milieu et, donc, que doit-on corriger et comment? Pour cela, l’agronome doit connaître les mécanismes de l’élaboration du rendement, les effets des techniques sur le milieu et leurs conditions d’emploi, les dynamiques des populations des êtres vivants autres que la plante cultivée. L’agronome moderne s’efforce de construire un «tableau de bord» de la conduite d’une culture, qui permette de piloter chaque champ cultivé en continu et selon ses caractéristiques propres.

Un des problèmes les plus délicats a pour origine le caractère aléatoire du climat. Or, c’est lui qui fixe les potentialités de la culture, donc ses besoins, et, par là, les corrections nécessaires du milieu par les techniques.

– Comment décrire les états instantanés du système de culture, et en particulier de ses mémoires? De nombreux problèmes se posent. Par exemple, comment obtenir des statistiques dans ce domaine? Dans une situation où le quotidien gouverne en partie le choix des cultures, les systèmes sont en constante évolution; comment les regrouper? La seule issue serait de les classer selon leurs conséquences sur les mémoires de la parcelle et sur le fonctionnement de l’exploitation agricole.

– Comment relier les états instantanés du système aux tendances évolutives de ses mémoires? Autrement dit, comment celles-ci fonctionnent-elles? C’est une question essentielle aussi bien pour le diagnostic que pour la construction de nouveaux systèmes de culture. Elle concerne, par exemple, l’entretien organique des sols et ses multiples répercussions, sur la dynamique de l’azote entre autres, qui rejaillit elle-même sur la conduite de la fertilisation et sur les risques de pollution. Elle se pose aussi pour l’évolution des populations parasites.

La grande interrogation sous-jacente est celle de l’irréversibilité éventuelle des évolutions du milieu.

– Quelles relations existent dans l’espace entre les différents systèmes de culture, que ce soit au sein d’une exploitation agricole ou d’une petite région? Les réponses à cette question sont encore très modestes, surtout dans le domaine parasitaire, mais aussi dans celui de la pollution, de l’érosion, etc.

– Comment les choix techniques sur une parcelle sont-ils dépendants du fonctionnement du système d’exploitation agricole, avec ses contraintes et ses échanges avec l’extérieur? On est frappé, lorsque l’on analyse les itinéraires techniques pour une culture, dans une petite région agricole, de leur grande variabilité. Le tableau 5 montre l’influence du type d’exploitation sur le choix du mode de désherbage. Les agriculteurs ont tendance à choisir la pratique la plus sûre, qui varie avec le type d’exploitation (liaison à travers l’organisation du travail, la main-d’œuvre disponible, l’existence de cultures concurrentes, etc.). Les choix pour désherber la même culture dépendent donc de l’exploitation considérée. On aurait pu montrer, de la même manière, les effets du type d’exploitation sur le choix d’une stratégie d’entretien de la fertilité du milieu.

Lorsqu’on considère le système de culture comme un programme de mise en valeur, il importe de fournir à l’agriculteur les outils de prise de décision adéquats et les références techniques adaptées. De très gros progrès restent à faire dans ce domaine, où l’empirisme est roi. Cela était acceptable lorsque les évolutions techniques et économiques étaient lentes et qu’une expérience pouvait se confirmer peu à peu. De nos jours, le droit à l’erreur, ou à l’échec, n’a plus cours.

L’évolution de l’agriculture et du contexte économique au cours des siècles a entraîné celle des systèmes de culture, mais plus encore celle du concept lui-même. Au départ, une simple description de l’occupation du sol caractérisait l’équilibre d’une communauté humaine sur un territoire: l’utilisation de l’espace ne variait guère dans le temps. Par la suite, ce phénomène ne reste vrai que pour l’exploitation: la rotation culturale est le reflet dans le temps de l’assolement annuel, mais, d’une exploitation à l’autre, de grandes variations sont possibles. Enfin, actuellement, il y a rupture entre assolement et rotation sur une même exploitation dont la vie est le résultat d’un équilibre entre les données agronomiques au niveau des parcelles et les données économiques. C’est pourquoi une classification des exploitations selon leur système de culture devrait comprendre deux grandes séries de critères, agronomiques et économiques.

Mais, qu’il s’agisse de gestion à court ou long terme d’un espace, les exigences actuelles sont telles, tant pour la reproduction des exploitations agricoles que pour la conservation du milieu ou la satisfaction des besoins nationaux (réduction des importations de protéines végétales, par exemple) que l’agronome doit nécessairement passer par une modélisation du fonctionnement du système de culture. Ainsi ce concept est-il devenu progressivement le concept central de l’agronomie, autour duquel s’organisent les différentes démarches visant à rendre chaque jour plus efficaces les agronomes.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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